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en Astrologie Naturelle

Balance
Le rythme Balance

Le rythme du Soleil en Balance repose sur l’écart minimal entre la nuit dominante et le jour dominé.

Balance

Balance : profil adapté

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Première facette : force d’excitation associative

Croissance du pôle nocturne dominant : fonction associative. Facilité à lier, relier, concilier, jeter des ponts.

Lorsque dans sa course autour du Soleil, notre planète franchit le point précis [1] de la bande zodiacale qui correspond à 0° Balance, le jour qui dans l’hémisphère Nord avait été majoritaire depuis six mois, devient minoritaire au profit de la nuit qui va dominer durant les six mois à venir. Pour l’acupuncture, c’est le moment de l’année où l’énergie centrifuge yang cède la place à l’énergie centripète yin, laquelle, comme la nuit, va primer jusqu’au prochain printemps. L’analogie s’impose entre l’évolution des mécanismes d’excitation auxquels prédisposent les rythmes zodiacaux et celle du yang qui suivent de concert la courbe — croissante au printemps, décroissante en été — du jour dominant. Elle vaut pareillement pour l’évolution des mécanismes d’inhibition et celle du yin, qui suivent aussi fidèlement la courbe — croissante en automne, décroissante en hiver — de la nuit dominante. Malgré son aspect sommaire, ce parallèle n’est pas aléatoire, et un expert aussi compétent en acupuncture qu’en astrologie pourrait sans doute le développer davantage.

L’astrologie contemporaine attribue au jour ce qui est de nature individuelle et à la nuit ce qui est d’ordre collectif. En récapitulant schématiquement : au printemps, le Bélier concerne l’appétit d’action et d’affrontement, le Taureau l’appétit de matérialisation et de possession, les Gémeaux l’appétit de communication et de mouvement. En été, la diminution du jour augmente les besoins de sécurisation qui trouveront satisfaction dans la chaleur de la maisonnée au Cancer, dans la force du moi au Lion, dans l’économie générale au stade Vierge.

Avec l’avènement de la nuit, les instincts basiques que la domination du jour mettait au premier plan sont « inhibés », autrement dit passent au second plan, au profit des impératifs collectifs. Toute société est une « association organisée d’individus en vue de l’intérêt général [2] » et si l’astrologie parle d’ouverture associative pour l’automne en général et pour la Balance en particulier, c’est dans la mesure où la saison et le Signe favorisent la subordination des intérêts particuliers à ceux plus subtils, moins innés en tout cas, de l’intérêt général.

L’inauguration d’un nouveau cycle et l’essor de la nuit qui caractérisent la Balance s’accompagnent d’un tout autre état d’esprit que celui auquel prédisposait la fermeture du cycle précédent. Le repli précautionneux n’est plus d’actualité et l’on peut aller à nouveau vers l’autre. « J’ai toujours su que je voulais communiquer, m’ouvrir à l’extérieur », affirme la rockeuse P. J. Harvey. « Les gens qui veulent tout contrôler sont des gens qui ont peur, pense l’actrice Susan Sarandon… Aimer, c’est comme jouer : il faut s’ouvrir et ne pas avoir peur. (…) Être sensuelle, c’est dire oui à la vie, oui à l’autre… » « Il est important de rester ouvert… et voir ce qui arrive… », assure également sa cadette Gwyneth Paltrow.

« En général, je suis très accommodant. (…) J’ai toujours cherché à ne casser les pieds de personne », disait en toute simplicité Marcello Mastroianni [3]. « Mes ennemis, qui sont nombreux, me reprochent de sourire tout le temps. Le Dalaï-Lama [4] sourit tout le temps aussi. Il explique pourquoi d’ailleurs : ça facilite le contact », raconte le réalisateur Jean-Jacques Annaud [5]. Aussi accueillantes soient-elles l’une que l’autre, l’ouverture « associative » de la Balance n’est pas la même que l’ouverture « naturelle » des Gémeaux. Le natif de la fin du printemps fait surtout preuve de spontanéité, de fraîcheur et de fantaisie, là où celui du début de l’automne se montre plus « civilisé », plus soucieux des normes et des formes qui régissent la vie sociale, comme le prouvent ses qualités de savoir-vivre, de courtoisie et de tact. Surtout, l’ouverture Balance est plus sélective que celle des Gémeaux, puisqu’elle ne se limite pas à l’aspect épidermique des affinités. On est loin du coup de cœur pur et simple du printemps. Il ne suffit pas de se plaire, il faut qu’existent des possibilités d’échange et de complémentarité d’un autre ordre.

Bien que décrit par son biographe [6] comme un adolescent timide, Graham Greene a actualisé très tôt l’associativité de son Signe en étant, dès l’âge de dix-neuf ans, le président d’une « Société de poésie et d’art dramatique modernes », ce qui lui permettait de prendre contact avec de nombreuses célébrités littéraires et de les mettre à contribution pour la revue Oxford Outlook, dont il s’était institué le rédacteur en chef. Le réflexe associatif porte à être et à mettre en relation sur la base d’intérêts communs que l’adapté repère facilement, ainsi que de considérations sociales qu’il se garde de négliger. Toujours informé sur qui est qui, qui est avec qui, qui fait quoi, qui peut quoi pour qui, il se fait fort d’être à la portée des personnes auxquelles il a affaire, en tenant discrètement compte de leurs inclinations en matière d’art, de culture, de politique, ainsi que de leur position hiérarchique et de leurs aspirations socioprofessionnelles. Que ce soit dans le cadre d’un partenariat, d’un groupe ou d’assemblées de plus grande envergure, le natif est un intermédiaire de premier ordre et excelle dans les relations publiques. En cas de requête à adresser, d’offre ou de marché à proposer, il sait à quelle porte frapper et veille autant à l’opportunité du moment qu’à la convenance du cadre. Les rencontres, sorties et dîners qu’il aime organiser réunissent donc les conditions idéales pour avoir les suites escomptées, tout au moins pour se dérouler dans le climat le plus propice à une entente cordiale.

Le plus souvent, le natif bénéficie d’une remarquable maîtrise du verbe, lequel, quoi qu’on en pense, reste ce qu’on a trouvé de plus simple pour établir un lien avec les autres et faire circuler les informations qui fondent la vie en société. La fonction associative de l’automne permet d’enchaîner les idées et les sujets d’intérêt général avec facilité. L’écrivain irlandais Oscar Wilde pratiquait à un haut niveau l’art de la conversation qui fait le charme de tant de Balances. Sa culture, son esprit, son brio auront contribué à sa légende, tant de son vivant qu’après sa mort, au point que le poète William Butler Yeats a pu dire à son sujet : « C’était les dîners qui étaient les événements de Wilde et qui faisaient de lui le plus grand causeur de son temps, et tout le mérite de ses pièces et de ses dialogues vient de ce qu’ils sont soit une imitation, soit un souvenir de ses conversations. » Wilde situait lui-même l’intérêt de ses pièces de théâtre bien plus dans leurs dialogues que dans leur intrigue, confirmant ainsi la priorité que le Signe porte à accorder à ce qui se passe entre les êtres, plutôt qu’aux êtres pris isolément. « Je suis ébloui par la facilité parce que je n’en ai pas, reconnaissait cette éminence grise de la politique et des lettres de son temps, qu’aura été Emmanuel Berl. Celui qui en avait, c’était Aragon [7]. » Emmanuel Berl a raconté comment le Fou d’Elsa parlait aussi bien qu’il écrivait et lâchait sa plume dès qu’il était sollicité par un ami pour retourner ensuite à son manuscrit où il terminait sans effort la phrase interrompue. Il va sans dire que l’aisance verbale est le fruit de multiples conditionnements et que l’occupation d’un ou plusieurs Signes d’automne à la naissance n’est pas la condition sine qua non pour parler ou écrire avec facilité [8]. Une dominante automnale y contribue néanmoins, et le natif de la Balance n’a en général aucun mal à trouver les mots, utiliser les formules et formulations les mieux appropriées aux circonstances et à l’interlocuteur du moment.

Certains natifs se présentent comme des individus « branchés » sur l’actualité, à la pointe de la mode et au courant des derniers potins. Les autres se préoccupent moins d’être dans le ton que d’avoir le ton juste, celui qui favorisera la qualité du dialogue. Même quand il est plus ou moins marginal, l’adapté reste au diapason de son environnement social et n’ignore rien des petits ou grands thèmes qui l’agitent « J’ai été sidéré de voir qu’il connaissait tous les jeunes chanteurs, et pas seulement de chez nous », a témoigné le P-DG de sa maison de disques à propos de Georges Brassens, lequel a pourtant toujours vécu en dehors du show business [9]. Nombreux sont par ailleurs les textes du poète qui comportent des références culturelles et abordent des sujets de société. Faisant preuve de l’originalité des associations d’idées de la Balance évoluée, Georges Brassens n’aura écrit Le Gorille que pour les tout derniers vers dans lesquels il aborde le thème de la peine de mort, sans avoir l’air d’y toucher, subtilement, façon « Balance ».

La nuit dominante du Signe favorise l’ouverture non seulement à cet inconnu qu’est toujours l’autre, mais aussi à l’inconnu au sens large. « Acceptez l’inconnu et vous voguerez sur une mer d’huile, préconisait John Lennon. Tout est inconnu. Si vous acceptez ça, vous passerez à la tête de votre propre jeu. » Bien des natifs éprouvent une réticence à mettre les points sur les i, à dire ou faire des choses qui se voudraient définitives, à boucler la boucle. « Tout ce qui se précise est une chose terminée », pense le comédien Bruno Cremer. Préciser, parfaire, terminer, c’est d’une certaine façon tirer un trait, couper le courant et barrer la route à l’échange comme au changement. Beaucoup moins rationnel que celui du Signe précédent, le natif de la Balance sait qu’une part de flou, de hasard et d’incertitude est indispensable à l’émergence des connexions nouvelles dont il est friand. « Il n’y a rien de parfait dans ce que je fais. Il n’y a donc pas de place pour la routine dans ma vie. Je fais en sorte de toujours me souvenir qu’il faut rester ouverte, disposée à accueillir ce qui peut arriver », a déclaré P. J. Harvey. « La seule chose qui me donne de l’énergie et des motivations pour tourner dans un film et qui m’empêche de devenir paresseuse ou complaisante, c’est de faire chaque fois quelque chose de différent… », a confié Gwyneth Paltrow. « Nous savons nous contenter de choses imparfaites, inachevées », a expliqué l’un des membres du groupe anglais Radiohead dont le leader, Thom Yorke, est né un 7 octobre. Ce groupe ne cesse, en effet, de surprendre en publiant des albums qui se suivent et ne se ressemblent pas, si bien qu’un critique musical a écrit qu’il « … est toujours jouissif de découvrir le travail d’un groupe affranchi, l’œuvre de créateurs aux gestes libres, dégagés de toute contrainte ».

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Deuxième facette : vitesse d’inhibition

Croissance du processus dominant : vitesse. Nuit : inhibition. Croissance de la nuit dominante : vitesse d’inhibition adaptée. Abstention, défensive, retrait rapide, mobiles appropriés au contexte et destinés à calmer le jeu.

Que ce soit le jour ou la nuit qui dominent, quand ils dominent et augmentent en même temps, cela se traduit par une grande vivacité des réactions. La vivacité printanière en rapport avec le jour se manifestait par la rapidité de l’ouverture et des réponses aux sollicitations extérieures. La vivacité automnale, en rapport avec la nuit, concerne les réactions défensives et se manifeste par la facilité à se retirer du jeu dès que nécessaire. La formule « vitesse d’inhibition adaptée » désigne la présence d’esprit consistant à se taire, garder pour soi ses impressions ou ses critiques, sitôt que la bienséance et le maintien de l’harmonie générale l’exigent. « Je suis ainsi faite, a écrit Katherine Mansfield dans son Journal [10], que dès que je me trouve avec quelqu’un, je me mets à prendre en considération ses opinions et ses désirs, alors qu’ils ne méritent pas la moitié de l’attention que valent les miens… » « Je ne me fâche jamais, certifie le metteur en scène Jean-Jacques Annaud. Ceux qui travaillent avec moi peuvent en témoigner. Je n’élève jamais la voix, je prends sur moi. »

Laisser libre cours à ses impulsions du moment, sans tenir compte des desiderata ou de la psychologie de l’interlocuteur et risquer ainsi de l’importuner, pire encore, de provoquer un conflit ouvert parce qu’on n’a pas pu s’empêcher de mettre de l’huile sur le feu, quoi de plus contraire en effet à l’associativité ? Mieux vaut s’abstenir, éluder, détourner, contourner, se garder une porte de sortie ou filer à l’anglaise, plutôt que nuire à l’ambiance ou jeter un froid dans une entente même superficielle. Si sa première facette incitait l’adapté à détecter les points communs qui rapprochent, sa seconde lui fait évaluer d’un coup d’œil en quoi tel rapprochement n’est pas momentanément souhaitable et, s’il l’est, en quoi mieux vaut ne pas soulever le lièvre qui risquerait de le compromettre.

L’addition du réflexe associatif et de la facilité à s’esquiver à bon escient débouche sur une forme d’ambiguïté qui se définit en termes de « problématique adhésion-évitement ». Solidaire, conciliant, coopératif, mais jusqu’à un certain point seulement, le natif de la Balance s’avère toujours prompt à faire le pas en arrière ou de côté de sa deuxième facette pour le pas en avant de sa première, afin de corriger discrètement le tir quand les risques de mésalliance, de discordance ou d’aliénation paraissent trop grands.

Aliénation, le grand mot est lâché. Le goût des contacts est indissociable de l’appréhension de toute forme d’engrenage qui en gênerait le renouvellement et la diversification. « La célébrité l’embêtait, a révélé la compagne de Georges Brassens, Püppchen, qui, pour sa part, a toujours su garder la bonne distance vis-à-vis du poète, elle lui volait sa liberté. (…) Il aimait beaucoup les femmes, mais il s’en méfiait un peu, il ne supportait pas que l’une d’elles lui mette le grappin dessus… » « Quand on est trop lié à quelqu’un, on finit par perdre une partie de soi… », pense la rockeuse P. J. Harvey. Selon Norman Sherry, son biographe, Graham Greene était trop curieux des choses de la vie pour se contenter d’une seule femme. Tout en aimant la sienne, il restait attiré par les « amours profanes » qu’il ne se privait pas de vivre en parallèle [11]. La vitesse d’inhibition permet non seulement de repérer à temps ce qui menace la liberté, en particulier les liens trop envahissants ou exclusifs, mais encore d’y échapper avec souplesse et habileté. « Je déteste ceux qui ne laissent pas vivre les autres, a admis Georges Brassens, ceux qui voudraient me dire : “C’est ça que tu dois faire.” Bien sûr, on vit sur quelques principes, mais il faut se tenir prêt à les remettre en cause, sinon on entre dans la nuit de l’entêtement. »

C’est parce que le natif tient à ce que sa porte ne soit jamais tout à fait fermée, qu’il ne peut pas l’ouvrir à cent pour cent non plus. Donnant au vis-à-vis l’engageante impression d’être en phase, il s’esquive dès qu’on cherche à le mettre en cage. Ses éclipses ne donnent d’ailleurs pas à un interlocuteur plus lent le temps d’en comprendre le motif, puisque sa réticence à couper radicalement les ponts le rend aussi discret dans sa façon de s’éclipser que sur les raisons pour lesquelles il a provisoirement disparu.

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Troisième facette : sens des contraires

L’écart entre la nuit dominante qui croît et le jour dominé qui décroît est minimal : sens des contraires. Sur fond associatif : sens de la complémentarité des contraires…

C’est le peu d’écart entre la durée de la nuit dominante et celle du jour dominé qui distingue le premier Signe d’automne des deux suivants. De minimal en Balance, il sera moyen au Scorpion pour devenir maximal au Sagittaire. La Balance porte à avoir le sens des contraires, le Scorpion celui des rapports dominant-dominé, le Sagittaire favorise celui des grands ensembles.

Parce qu’il est associatif, l’adapté de la Balance ne réagit pas aux contraires à la façon frontale et tranchée de celui du Bélier pour qui ils s’excluent, ni à la façon inquiète du Virginien pour qui ils se menacent. Il perçoit d’abord leur complémentarité. La sensibilisation Balance à la complémentarité d’antagonismes tels que toi/moi, homme/femme, ami/ennemi, dit/non-dit, vérité/mensonge, droite/gauche, envers/endroit, etc., a pour corollaire celle à l’incomplétude de chaque terme pris séparément.

Le natif est prédisposé à croire qu’en général personne n’a entièrement raison ni entièrement tort, et que deux visions opposées peuvent être aussi éclairantes l’une que l’autre. À l’instar du cinéaste espagnol Pedro Almodovar que l’idée de démontrer l’inverse de ce qu’il pense amuse beaucoup [12], il n’est ni unilatéral, ni manichéen. Modéré, tolérant, il se met volontiers à l’écoute de l’autre soit pour compléter, voire modifier, son propre point de vue — rarement catégorique —, soit pour le conforter. « La dépréciation du camp adverse ne me plaît guère, a écrit dans son Journal André Gide dont la Balance était le Signe ascendant, car il est absurde et malséant de ne voir l’intelligence, la probité, le courage et la noblesse que d’un côté, le sien propre, et de l’autre que lâcheté, sottise ou félonie. » « Il n’aimait pas que l’on coupe la parole à quelqu’un qui exposait des idées contraires aux siennes », se souvient l’un de ses ex-condisciples au sujet de Vladimir Poutine [13].

Comme pour Georges Brassens, la tolérance Balance fléchit cependant face aux détenteurs de vérité incapables de s’ouvrir à un point de vue autre que le leur, a fortiori de réfléchir aux conditionnements socioculturels dont procèdent les divergences. Le sens automnal des contraires se solde plus souvent par des points d’interrogation que par des certitudes inébranlables. « Et si j’étais né en 17 à Leidenstadt /, s’est demandé dans l’une de ses chansons l’auteur-compositeur attitré de Céline Dion, Jean-Jacques Goldman, / Sur les ruines d’un champ de bataille / Aurais-je été meilleur ou pire que ces gens… / … / Serions-nous de ceux qui résistent ou bien les moutons d’un troupeau / S’il fallait plus que des mots ? »

Le sentiment que la vérité se trouve rarement d’un seul côté, encore moins aux extrêmes, mais plutôt au centre, entraîne le rejet du militantisme, du sectarisme, de la violence tant verbale que physique ainsi qu’un goût prononcé pour l’entre-deux, le demi-ton, le clair-obscur. « J’aime ce petit monde en demi-teintes, a expliqué Marcello Mastroianni en évoquant sa prédilection pour le théâtre de Tchékhov. (…) Le drame est là, bien sûr, mais c’est un drame qui frôle le ridicule, qui fait rire aussi et la grandeur de cet auteur en demi-teintes est là. (…) Shakespeare est un auteur énorme mais les mezzavoce de Tchékhov sont plus émouvants [14]. » La plupart des natifs n’apprécient pas que l’on soit trop direct et ne sont guère portés à l’être eux-mêmes. « Il y a des gens qui aiment se dévoiler ; moi je préfère me dévoiler indirectement », nous dit Catherine Deneuve. « Je suggère les choses, je n’aime pas signifier. On est plus efficace en étant indirect, par le biais… », expliquait Georges Brassens.

La vision qu’avait Glenn Gould de la créativité illustre en partie le manque d’attrait Balance pour les évidences criantes et simplistes : « Il existe des artistes, a-t-il écrit, qui croient que l’originalité est fonction de la brutalité avec laquelle ils brisent les règles. Je ne pense pas que cela soit vrai, mais bien plutôt que l’originalité est fonction de la subtilité avec laquelle vous adhérez à des prémisses légèrement différentes de celles qu’on attend de vous [15]. » La subtilité, le sens de la nuance sont une conséquence du sens de la complémentarité des opposés. Le raffinement esthétique dont font preuve par ailleurs certains natifs repose sur l’art de jouer avec les contrastes — avec les pleins et les déliés —, de telle sorte que, loin de jurer entre eux, ils se mettent mutuellement en valeur.

Toute expansion amène un climat de confiance, surtout à son début. Peut-être faut-il voir dans l’expansion naissante du pôle dominant de la Balance ainsi que dans sa nature nocturne, la raison pour laquelle l’adapté du Signe envisage assez sereinement la part de négatif dans le positif ou de positif dans le négatif, et trouve l’alternance normale et même souhaitable. « Une carrière doit suivre une courbe avec des hauts et des bas, assurait Marcello Mastroianni. Si on rate un film et que le suivant est bon, on ressent comme une ivresse. Mais si tous les films sont bons, on est toujours sur le même plan et c’est moins drôle. »

Vu sous l’angle des contraires, le pôle dominant d’un Signe a trait à soi-même et le pôle dominé à l’autre, mais dans la mesure où le jour symbolise ce qui est individuel et la nuit ce qui est collectif, la nature nocturne du pôle dominant de la Balance renvoie le « moi » au « non-moi ». Arthur Rimbaud a illustré ce paradoxe dans le saisissant raccourci : « Je est un autre », qui évoque l’injonction d’Oscar Wilde à André Gide : « N’écrivez plus jamais “je”. En art, il n’y a pas de première personne. » Beaucoup de natifs de la Balance n’ont pas un sentiment exacerbé d’eux-mêmes et recherchent le contrepoids de l’autre pour mieux savoir qui ils sont, ce qu’ils pensent, ce dont ils sont capables, ce qu’ils veulent et valent : « Je ne m’estime pas, affirmait Brassens, je me compare. » Les deux plateaux de l’instrument qui symbolise le Signe évoquent la propension de ses natifs à fonctionner en tandem pour dialoguer d’abord, pour être à même d’actualiser au maximum leur potentiel ensuite. « Je porte en moi tout ce qu’il faut pour être une bonne comédienne, exposait Brigitte Bardot à l’âge de trente-cinq ans. Mais si quelqu’un ne sait pas faire sortir de moi cette petite lumière, je ne peux pas la donner toute seule. Il faut savoir m’expliquer, avec des nuances, me dire exactement ce que je dois faire. Alors, je sais tout faire, je sais me donner. Mais toute seule, je n’y pense pas [16]. » « … Je sais qu’entre tes mains tu tiens les quelques mesures finales sans lesquelles le chant de ma vie demeure incomplet… », écrivait Katherine Mansfield à l’un des hommes qu’elle a aimés.

C’est sans doute à cause du sentiment qu’a le natif de son incomplétude et du besoin fondamental qui en découle d’un interlocuteur, d’un associé, d’un partenaire, que la Tradition a attribué la sentimentalité à la Balance. En réalité, aucun Signe ne prédispose plus qu’un autre à être sentimental. Pour ce qui est du seul conditionnement céleste, la sentimentalité se détecte à la signature planétaire et s’accorde a priori assez mal avec la disponibilité aux rencontres nouvelles et l’appréhension parallèle devant toute forme d’engagement trop exclusif.

Le sens de la justice que l’on impute aussi à ce Signe tient mieux la route. « Il n’y a pas de mauvais morts d’un côté et de bons morts de l’autre », s’insurgeait Yves Montand. Mais l’adapté de la Balance ne tranche, ni ne condamne. Il évalue finement en quoi l’attitude de l’un induit volontairement ou non l’attitude de l’autre, ménage la chèvre et le chou, privilégie les rapports d’égal à égal, est en quête du juste milieu sans perdre de vue sa relativité. Plus disposé à excuser qu’à accuser, à poser le problème qu’à imposer une solution, soucieux d’équité et d’équilibre, il n’est pas un juge mais un médiateur qui sait faire preuve de neutralité et excelle dans les fonctions intermédiaires d’arbitrage, de transmission, de négociation où il se retrouve parfois plus souvent qu’il ne voudrait. La Balance était fortement occupée à la naissance d’un bon nombre de présentateurs-animateurs des médias. Rien d’étonnant à cela, dans la mesure où ce genre d’activité demande de passer par-dessus les incompatibilités éventuelles, pour traiter avec les mêmes égards des personnalités de bords opposés. Contrairement à la sentimentalité et comme la justice, la diplomatie attribuée depuis toujours à ce Signe n’est pas un vain cliché.

Le sens Balance des contraires peut favoriser la forme d’humour consistant à réunir dans une même pensée des états et des situations antinomiques. Oscar Wilde [17] s’est montré très fort à ce jeu-là : « Un homme peut être heureux avec n’importe quelle femme, à condition de ne pas l’aimer. » « Je puis croire toutes choses, pourvu qu’elles soient franchement incroyables. » « Il n’y a que les esprits légers pour ne pas juger sur les apparences. Le vrai mystère du monde est le visible et non l’invisible. » « Je raffole des plaisirs simples : c’est le dernier refuge des âmes compliquées. » L’on doit d’autres traits d’esprit tout aussi savoureux à Groucho Marx, né un 2 octobre. « Je ne souhaite pas faire partie d’un club qui m’accepterait pour membre. » « La seule façon de savoir si un homme est honnête est de le lui demander. S’il répond par l’affirmative, vous saurez qu’il est un escroc. » « Le mariage est la première cause de divorce. » « Pourquoi devrais-je me soucier de la postérité ? Qu’est-ce que la postérité a jamais fait pour moi ? »

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Balance : profil inadapté

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Première facette : faiblesse d’inhibition protectrice

Décroissance du jour dominant de la Vierge : instinct d’autoprotection et de conservation. Décroissance du jour dominé de la Balance : carence de l’instinct d’autoprotection et de conservation.

La première facette du profil inadapté de la Balance repose sur une carence de l’autoprotection qui fait la force de la Vierge, le Signe à la fois précédent et inverse. Au jour décroissant et légèrement dominant du dernier Signe d’été, correspond en effet le jour minimal décroissant et légèrement dominé du premier Signe d’automne. Le plus souvent, toute personne née sous un Signe porte en elle, dans des proportions variables, les tendances de ses deux profils, mais quand il s’agit de la Balance, ces tendances sont tellement aux antipodes les unes des autres, qu’à l’ambivalence adhésion/évitement vient s’en ajouter une autre : dans ses mauvais moments, le natif du début de l’automne s’avère aussi ingérable qu’il est civilisé en temps normal.

Contrairement à l’adapté de la Vierge, l’inadapté de la Balance ne se soucie ni de ses limites personnelles, ni de celles imposées par l’extérieur et n’a que faire des notions de stabilité, sécurité, prudence, discipline, contrôle. Les verrous estivaux ayant sauté, l’instinct de conservation fait défaut et se traduit, entre autres, par l’incapacité à se fixer où que ce soit, avec qui que ce soit et de quelque façon que ce soit. « Je suis attirée par le style de vie gitan, nomade. Je pense que je pourrais vivre sans attaches », a déclaré P. J. Harvey. « Moi aussi, je me suis construit des maisons, mais j’entre par la porte et je sors par les fenêtres… », plaisantait Marcello Mastroianni. « Il me faut errer, je ne puis ni ne veux bâtir ma maison sur le roc, la barbe ! » écrivait dans son Journal, alors qu’elle était encore adolescente, Katherine Mansfield dont la brève existence n’aura été fidèle qu’à ce propos et à sa vocation d’écrivain. « Elle liait des amitiés de passage et les abandonnait, a rapporté John Cale à propos de Nico, l’égérie du Velvet Underground, le groupe qu’il avait fondé avec Lou Reed. Sa vie était orientée vers l’éphémère comme une épave à la dérive chargée de sentiments détruits. » « Je ne connais pas de limites », se vantait l’intéressée qui l’a prouvé aux dépens de plusieurs personnes et sans se soucier des dégâts.

Comparativement à la fourmi qu’est le natif de la Vierge, l’inadapté de la Balance est le prototype de la cigale qui préfère la sérénade au sérieux, le tourbillon à la tranquillité, l’anarchie à l’ordre, l’excès à la mesure. « La modération est une chose fatale. Assez est mauvais comme un repas. Trop est bon comme un festin », a écrit Oscar Wilde qui prônait l’abolition de la propriété, du mariage et des gouvernements. « On devinait tout de suite qu’elle se jetait la tête la première dans la vie, a raconté Catherine Deneuve au sujet de Romy Schneider. C’était une actrice extrêmement en danger… ou plutôt une femme en danger [18]. » « Contrairement à ce qu’on croit, je ne suis pas du tout raisonnable, je ne suis pas très équilibrée, je suis quelqu’un de très excessif », confiait, à cinquante ans passés, la grande actrice française sur elle-même. L’inadapté économise aussi peu ses fonds que sa personne, et situe mal la frontière entre générosité et prodigalité. « Je n’ai jamais accordé d’importance à l’argent. J’ai toujours tout dépensé et je continuerai », professait Marcello Mastroianni. Même son de cloche à propos de Georges Brassens, dont le secrétaire devait sans cesse freiner la générosité envers les personnes dans le besoin.

Les réflexes collectifs prenant le pas sur les instincts individuels en général, sur le réflexe sécuritaire de la Vierge en particulier, certains natifs suivent aveuglément les injonctions du prêt-à-penser véhiculé par les médias, sans s’interroger sur leur nocivité potentielle. Quand le conformisme se borne à réciter les couplets les plus convenus du politiquement correct ou à courir voir le dernier spectacle qu’il « faut » avoir vu, cela ne porte guère à conséquence. C’est évidemment plus risqué, quand ce même conformisme amène à se faire retrousser la lèvre supérieure ou remodeler le corps à un âge précoce, ainsi qu’à se bourrer d’hormones ou se faire remonter les traits et le reste, à un âge plus avancé. Le gourou et fondateur de « L’Église raélienne » qui prétend avoir contribué au premier clonage humain — idée tout à fait dans le vent de ce début de XXIe siècle —, Claude Vorilhon [19], a actualisé de la façon la plus extrême la carence du sens des limites et le mépris des lois de la nature auxquels porte cette facette. Tel le mouton de Panurge, la « victime de la mode [20] » et l’adepte de l’artifice qu’est l’inadapté de la Balance, suit le troupeau sans se rendre compte qu’il court se noyer.

Dans tous les domaines, le manque d’autoprotection incite à passer outre aux garde-fous chers à la Vierge, en particulier à n’avoir aucune défense vis-à-vis de ce qui procure le frisson. Dans le rapport amoureux, cette carence s’exprime par la passion la plus échevelée, le don de soi le plus total, celui que D. H. Lawrence qualifie de suicide. Mais la passion se nourrit de turbulences davantage que de calme plat et il est rare que le même objet la suscite longtemps, à moins d’être aussi absent et inaccessible qu’Yvonne de Galais, l’inspiratrice du Grand Meaulnes, qu’Alain-Fournier aura aimée huit ans alors qu’il ne l’avait vue qu’une fois ! Le plus souvent, l’inadapté exprime dans ses amours son impossibilité à se maîtriser, sa difficulté à vivre seul ou autrement que par procuration, son besoin de se perdre, davantage que celui de se trouver. « Il faut se cuirasser, se vertébrer, a recommandé Brigitte Bardot, dont la vie sentimentale aura été aussi agitée que celle de nombreux natifs de son Signe. Moi, je n’étais absolument pas, je ne le suis toujours pas, du reste, protégée par une quelconque cuirasse. Je me suis toujours donnée à tout [21]. »

À l’image des personnages de Choderlos de Laclos que rien n’arrêtait, l’inadapté est attiré par les « liaisons dangereuses » qui permettent de jouer avec le feu et d’échapper ainsi à la morne répétitivité du quotidien, d’échapper à soi-même finalement. Spécialiste de la fuite en avant, plus disposé à larguer les amarres qu’à jeter l’ancre, il ressemble, de près ou de loin, au bateau ivre d’Arthur Rimbaud, Balance Ascendant Balance.

Balance

Deuxième facette : lenteur d’excitation inadaptée

Jour dominant et décroissant de la Vierge : lenteur d’excitation adaptée. Jour dominé et décroissant de la Balance : lenteur d’excitation inadaptée. Entêtement dans l’erreur, spécialement sur le plan des associations destructrices.

La décroissance du jour dominant de la Vierge va de pair avec ce que l’astrologie moderne appelle la « lenteur d’excitation adaptée », qui revient à s’ouvrir lentement mais durablement à ce qui s’avère constructif. La décroissance du jour dominé de la Balance se traduit par une lenteur d’excitation inadaptée. Pour le plus ambigu des Signes, c’est là une ambiguïté supplémentaire. La présence d’esprit que manifeste opportunément le natif pour esquiver habilement ce qui ne lui inspire rien de bon, peut coexister avec la disposition inverse consistant à aller aussi lentement qu’obstinément au bout de ce dans quoi il aurait mieux valu, pour sa sauvegarde personnelle, qu’il ne se soit jamais engagé.

Ainsi, autant le profil inadapté de la Vierge porte à se rétracter instantanément devant tout ce qui semble menacer l’intégrité personnelle, autant celui de la Balance prédispose à entretenir des aspirations chimériques et à persister dans les comportements inconséquents, risqués et voués à l’échec. Les dernières années d’Oscar Wilde donnent une idée extrême, mais néanmoins éclairante, de la façon dont les deux premières facettes du mauvais profil Balance se combinent pour favoriser l’obstination dans une forme ou une autre de liaison dangereuse [22]. En 1895, la relation amoureuse que l’écrivain irlandais entretient depuis 1891 avec le fils de lord Queensberry, l’ange noir Alfred Douglas, fait scandale dans la puritaine Angleterre où l’homosexualité est interdite et durement réprimée. À son ami André Gide qu’il revoit à Alger et qui lui conseille d’éviter de revenir dans son pays, Wilde répond : « Il faut que j’aille aussi loin que possible… » De retour à Londres, il décide de poursuivre en diffamation lord Queensberry qui vient de le traiter de « sodomite ». Au lieu d’écouter ses amis qui redoutent que le procès ne se retourne contre lui, il ne peut s’empêcher de souscrire au désir de se venger d’un père exécré qui harcèle son jeune amant, alors que ce dernier lui a déjà donné toutes les preuves de son égoïsme, de son indifférence et surtout de sa dangerosité. Comme il fallait s’y attendre, Wilde est convaincu d’homosexualité et doit faire face à un deuxième procès. À nouveau, ses amis le pressent d’aller en France, mais les goûts de luxe de son protégé ont fini par le priver des moyens de s’enfuir. Condamné à deux ans d’incarcération durant lesquels Alfred Douglas ne lui donne aucun signe de vie, il sort de prison, seul, déshonoré, ruiné, malade. Il revoit malgré tout l’homme qui a causé sa perte, ce qui lui coûte la petite rente que son épouse avait consenti à lui verser à l’expresse condition qu’il tire un trait définitif sur sa fatale liaison. Il meurt moins de trois ans plus tard, à l’âge de 46 ans, dans un total dénuement.

Balance

Troisième facette : phase égalitaire

La durée du jour dominé et décroissant équivaut presque à celle de la nuit dominante et croissante. Phase égalitaire : un contraire égale l’autre. Réactions unilatérales d’adhésion ou d’évitement devant des options opposées…

Sur fond d’associativité et de vivacité défensive, l’adapté de la Balance détecte en quoi les contraires se complètent, plus qu’ils ne se combattent, mais privilégie les bons alliages autant qu’il écarte les moins bons. Sur fond de manque de limites protectrices et d’entêtement dans certaines erreurs, la phase égalitaire en rapport avec l’équivalence de durée entre le jour dominé et la nuit dominante débouche sur la même adhésion de surface à des options qui s’excluent. L’inadapté de la Balance croit ou veut croire qu’un contraire vaut l’autre. En politique, par exemple, la droite lui semble comporter autant de bons ou de mauvais côtés que la gauche et vice versa. Les facultés discriminatrices que favorisent, tant le Signe précédent, la Vierge, que le Signe suivant, le Scorpion, font défaut.

« On peut se demander en effet, a écrit Nietzsche, premièrement, si, d’une façon générale, il existe des contraires et, en deuxième lieu, si les évaluations et les oppositions que le peuple s’est créées pour apprécier les valeurs, sur lesquelles ensuite les métaphysiciens ont mis leur empreinte, ne sont pas peut-être des évaluations de premier plan, des perspectives provisoires, projetées, dirait-on, du fond d’un recoin, peut-être de bas en haut ? (…) Affirmer par exemple que le déterminé a plus de valeur que l’indéterminé, l’apparence moins de valeur que la “vérité” : de pareilles évaluations, malgré leur importance régulative pour nous, ne sauraient être que des évaluations de premier plan [23]… » « Il n’y a pas d’abrutis, je n’en ai jamais vu, tout homme est capable de tout goûter », prétendait de son côté Georges Brassens qui ne manquait pas de finesse et a pourtant chanté « Quand on est con, on est con. » À la question : « Quels sont vos poètes préférés ? » il avait coutume de répondre : « Tous… À peu près… » À propos de ses chansons préférées : « Je les aime toutes [24]. »

La phase égalitaire Balance se traduit par un problème fondamental de choix, de décision, d’engagement. « J’avais devant moi le plus incertain des hommes, s’est étonné quelqu’un [25] qui a rencontré Louis Althusser. Au lieu du dogmatique que je m’imaginais, un pur sceptique… J’ajouterai qu’Althusser était aussi trop courtois, trop libéral, trop distrait—trop indifférent et revenu de tout—pour qu’on pût le soupçonner une seule minute d’être sérieusement engagé dans une cause quelconque. » Oscillant, « balançant », sans cesse entre oui et non, blanc et noir, restant « sur le bord vertigineux des choses [26] », se dérobant continuellement à ce qui l’oblige à prendre parti pour ou contre quelque chose ou quelqu’un, tout en se mettant à son insu perpétuellement entre deux feux, le natif concerné donne l’impression de ne pas savoir ce qu’il veut, de pratiquer la langue de bois, d’être incapable de se mouiller. Même Georges Brassens n’a pas échappé à ce genre de critique, en affichant son refus de « mourir pour des idées » ou en mettant l’occupant et l’occupé sur le même plan dans sa chanson Les Deux Oncles. Ce n’est pas ce qu’il a exprimé, mais c’est l’interprétation qui en a été faite. La propension Balance à ne pouvoir affirmer une chose sans en même temps la moduler par des considérations inverses, débouche sur des dialectiques si subtiles qu’elles en deviennent difficiles à suivre—« Malheur à moi qui suis nuance », s’était exclamé Nietzsche. Dans le registre de l’inadaptation, l’excès de nuance rend la pensée tellement floue qu’elle en devient nulle et non avenue.

Sur le plan sentimental, l’ambivalence qui permet à l’adapté de s’engager sans se laisser aliéner se traduit chez l’inadapté par autant de difficulté à s’engager qu’à se passer d’un lien privilégié, ce que résume la formule « ni sans toi, ni avec toi ». Dans son chef-d’œuvre, Gatsby le Magnifique, Francis Scott Fitzgerald, dont la pathétique dérive personnelle aura surtout illustré les deux premières facettes du profil inadapté de son Signe solaire, développe le thème, plus spécifique à la troisième, des ravages possibles de l’identité d’accueil devant des alternatives qui s’excluent. Le personnage de Daisy, globalement représentatif du conformisme, de l’instabilité et de l’indétermination du mauvais profil Balance, n’arrive pas à choisir entre la relation facile qui la lie à un mari volage et sans profondeur, et la passion romantique qu’elle inspire à Gatsby. Bien qu’elle ne la laisse pas indifférente, cette passion l’effraie, dans la mesure où elle appelle un véritable engagement de sa part qui l’obligerait à rompre avec son mode de vie superficiel. Daisy reste donc évasive et son indécision finit par décider à sa place puisqu’elle provoque la mort de Gatsby, en même temps qu’elle la maintient dans le milieu aussi futile qu’hypocrite où elle s’étourdit faute de s’y épanouir. Le personnage de Gatsby illustre quant à lui la propension de la deuxième facette du profil inadapté de la Balance à continuer obstinément sur sa lancée alors que tous les feux sont au rouge.

« Le drame du natif de ce Signe, tout en pas de clerc, suivis d’assauts inattendus, peut être de savoir lier sans étreindre, assembler sans réunir, se tenir à la limite de l’acceptation et du rejet, a magistralement résumé Jean-Pierre Nicola. Un drame que les Balance douées vivent éventuellement par de hautes compétences diplomatiques ou politiques, et qui en égare d’autres dans l’incohérence de choix impraticables… »

Cet article vous a été proposé par Françoise Hardy

[1] Ce point se situe à l’intersection Ouest de l’écliptique et de l’équateur céleste, face à celui de 0° Bélier. L’axe qui réunit les deux points nommés « gamma » correspondant à 0° Bélier et 0° Balance, est celui des équinoxes.

[2] Définition du Dictionnaire Larousse.

[3] Enzo Biagi, Marcello Mastroianni, Ma Dolce Vita, Éditions du Rocher.

[4] Selon une source qui n’est pas sûre à cent pour cent, le Dalaï-Lama serait Cancer Ascendant Balance.

[5] Jean-Jacques Annaud est, entre autres, le réalisateur de Le nom de la rose, L’Ours, L’Amant, Sept ans au Tibet, La Bataille de Stalingrad

[6] Norman Sherry, Graham Greene ou le Bord vertigineux des choses, Robert Laffont.

[7] Emmanuel Berl, écrivain, philosophe, essayiste, éditorialiste : Lion Ascendant Vierge avec Mercure dominant qui se lève dans ce Signe. Dominante estivale. Louis Aragon : Soleil et Mars dominants en Balance, conjonction Uranus-Saturne en Scorpion, Ascendant Sagittaire. Dominante automnale.

[8] Les dominantes planétaires sont également à prendre en compte pour la prédisposition à l’aisance verbale : être né à une heure forte du Soleil, de Jupiter, d’Uranus ou de Mercure peut favoriser cette aisance. À l’inverse, être né à une heure forte de Neptune, Pluton ou Saturne ne facilite pas ou ne fait guère privilégier ce type de communication.

[9] À la naissance de Georges Brassens, le Taureau et le Cancer étaient valorisés de façon significative.

[10] Katherine Mansfield, Journal, Stock.

[11] Norman Sherry, Graham Greene ou le Bord vertigineux des choses, Robert Laffont.

[12] Pedro Almodovar, conversations avec Frédéric Strauss, Cahiers du cinéma. Pedro Almodovar est Balance Ascendant Gémeaux. La Balance porte à pouvoir adhérer partiellement à deux points de vue opposés, les Gémeaux à avoir tous les avis en même temps.

[13] Vladimir Poutine est né le 7 octobre 1952, à Leningrad, on ignore à quelle heure. Malgré tout, à sa naissance, le Soleil, Saturne, Neptune et Mercure étaient conjoints en Balance à la quadruple dissonance d’Uranus. Autant la Balance favorise la tolérance, autant Uranus, quand il est fort et dissonant, peut favoriser l’implacabilité des convictions et des décisions.

[14] « Je me souviens », interview filmée en 1996 par Anna-Maria Tatô, la compagne de Marcello Mastroianni depuis 22 ans.

[15] Glenn Gould, Écrits réunis et traduits par Bruno Monsaingeon, Fayard.

[16] Extrait d’une interview de Brigitte Bardot par Jacques Chancel pour France-Inter, 1970.

[17] Oscar Wilde était Balance Ascendant Vierge et Neptune, l’une de ses planètes fortes, était en Poissons. Trois Signes d’équinoxe sur quatre étaient donc valorisés dans son ciel natal.

[18] Dans le ciel natal de Catherine Deneuve, le Signe du Lion, très occupé, et le Capricorne, à l’Ascendant, apportent un salutaire contrepoids à la Balance à l’irretenue Balance. Catherine Deneuve a, semble-t-il, bénéficié d’une éducation plus structurante que Romy Schneider, dont l’Ascendant Gémeaux et la situation de sa dominante planétaire en Verseau ne pouvaient, sur le plan du conditionnement céleste, qu’accentuer la tendance à se mettre en danger tant dans ses films que dans sa vie personnelle.

[19] Dominante automnale très prononcée avec Soleil, Mercure et Neptune en Balance, Jupiter, Mars, Vénus en Scorpion, Lune en Sagittaire. Uranus culmine en Gémeaux.

[20] Poissons Ascendant Scorpion, MC Solaar, l’auteur de la chanson Victime de la mode, avait tous les Signes d’automne occupés à sa naissance, en particulier la Balance par une triple conjonction Uranus-Jupiter-Lune. Le profil inadapté de la Balance, celui du Sagittaire, mais aussi une dominante solaire peuvent favoriser le conformisme.

[21] Le manque de cuirasse invoqué par Brigitte Bardot relève à la fois de la Balance et de l’axe Gémeaux Sagittaire qui domine son ciel natal.

[22] La passion chimérique d’Alain Fournier pour Yvonne de Galais illustre également cette facette.

[23] Friedrich Nietzsche, Par-delà le bien et le mal. Tous les Signes équinoxiaux de sens des contraires étaient occupés à la naissance de Nietzsche.

[24] La réticence à prendre parti était accentuée chez Brassens par ses dominantes mercurienne, lunaire et plutonienne.

[25] Il s’agit de Clément Rosset.

[26] Le Bord vertigineux des choses est le titre choisi par Norman Sherry pour sa biographie de Graham Greene.

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