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en Astrologie Naturelle

Bélier
Le rythme Bélier

Le rythme du Soleil en Bélier repose sur l’écart minimal qui se creuse entre le jour dominant et croissant et la nuit dominée et décroissante.

Bélier

Bélier : profil adapté

Le profil adapté comporte trois facettes en rapport avec les trois paramètres qui définissent le Signe : 1. Nature diurne ou nocturne du pôle dominant : ici, le pôle dominant est diurne, l’excitabilité l’emporte sur l’inhibition, la présence sur l’absence. 2. Croissance ou décroissance du pôle dominant : ici, le pôle diurne dominant croît, l’excitabilité se déclenche vite. 3. Écart minimal, moyen ou minimal entre le pôle dominant et le pôle dominé : ici, l’écart est minimal et s’agrandit, l’excitabilité est polarisée, elle sensibilise aux contraires et au fait qu’ils s’excluent.

Ces trois facettes renseignent sur les atouts spécifiques auxquels prédispose le Signe. La personne chez qui il était occupé de façon significative à la naissance aura tendance à s’adapter au monde grâce à ces atouts.

Bélier

Première facette : force d’excitation naturelle

Victoire du jour : besoin de dépenser l’énergie individuelle dans l’instant et de façon intensive. Force et spontanéité de l’excitabilité.

À l’instant où sous les latitudes nord, le Soleil franchit le degré zéro du Bélier, c’est le début du printemps : le jour, dominé en durée par la nuit pendant les six mois précédents, la dépasse désormais, et il en sera ainsi pendant les six mois à venir.

Comme l’astrologie moderne, l’acupuncture, médecine orientale millénaire dont l’efficacité n’est plus à prouver, se fonde sur le fait que « notre horloge biologique semble réglée sur une alternance déterminée de jour et de nuit [1] ». Elle a établi que le début du printemps correspondait à la fin du cycle de l’énergie yin et au début de celui de l’énergie yang, laquelle va augmenter jusqu’au pic de la fin de la saison. Parallèlement à la progression du yang, celle du jour victorieux va se poursuivre jusqu’au coup d’arrêt du premier jour de l’été. La médecine chinoise attribue au yang ce qui est « chaud, solaire, masculin », tandis que l’astrologie contemporaine met le printemps en rapport avec l’énergie et considère que l’augmentation de la durée de présence du Soleil au-dessus de l’horizon, prédispose à réagir avec force et rapidité aux sollicitations.

C’est ce que la Tradition exprimait à sa façon en faisant du Bélier un Signe de feu. « Il y a un feu en lui, affirme Burt Reynolds à propos de Russell Crowe [2], un feu qui brûle toute la nuit, toute la journée, tout le temps. » L’astrologie moderne ne tient pas compte des éléments — Feu, Terre, Air, Eau —, aussi parlants qu’ils soient, puisqu’elle se réfère à la réalité objective et invariante du rythme jour/nuit qui va plus loin qu’une simple image.

Comme le jour qui émerge de la nuit, comme le yang qui supplante le yin, comme le bourgeon qui éclot sous la poussée de la sève, le natif du Bélier est d’abord occupé à naître, à respirer à pleins poumons, à dépenser sans compter l’énergie dont il a à revendre. Il ressemble à l’enfant qu’évoque le jour naissant. Il en a la sincérité et l’innocence désarmantes — « Il y a de l’ingénuité chez moi qui me préserve d’être mécanique… », constatait Serge Gainsbourg à près de soixante ans. Ne cherchant ni à s’analyser, ni à se comparer, il en a aussi l’absence de complexes ainsi que la curiosité vis-à-vis du monde extérieur auquel il a besoin de se frotter pour se sentir exister et à la conquête duquel il part avec le dynamisme, l’audace et l’idéalisme de la jeunesse. Un monde vis-à-vis duquel il n’éprouve aucune appréhension particulière. « J’ai pensé qu’il n’était pas seulement charismatique et talentueux, mais qu’il n’avait peur de rien, ce qui ajoute à sa séduction », a dit Sharon Stone à propos de Russell Crowe qui, comme Jean-Paul Belmondo, effectue lui-même la plupart de ses cascades.

L’adapté du Signe n’a peur de rien parce que la force d’excitabilité de sa première facette le porte à être dans l’« ici et maintenant » avec une intensité telle qu’elle ne lui permet guère d’anticiper quoi que ce soit. En prise directe avec l’existence, il la prend à bras le corps et la croque à belles dents. Il ne vit ni par procuration, ni dans le virtuel, il « vit » tout court. Marion Brando donnait toujours l’impression de jouer comme s’il « … allait mourir le lendemain, pire dans l’heure qui suit… », rapporte un de ses biographes [3]. « Il faut que je vive à fond… Vivre au présent, c’est ça la vie », assure Christophe Lambert. « Il faut se laisser envahir par la vie », recommande Russell Crowe [4]. « Le plus vrai de soi c’est l’instant », insiste Fanny Ardant qui prétend ne jamais imaginer « … aucune chose de la vie que pour un temps court. » « La passion est plus indispensable que la réussite… Être envahi… Que tous les temps de la journée soient envahis, tendus. »

Le jour Gémeaux qui sera le plus long de l’année, tout en augmentant encore, ira de pair avec une ouverture au monde diffuse et un champ d’action diversifié. Celui bien plus court du Bélier favorise une ouverture polarisée qui fait agir au coup par coup. « Je ne suis pas arrogant, je suis focalisé », s’est défendu Russell Crowe à propos des critiques qui couraient sur son compte. « J’ai des idées, a-t-il précisé, si vous appelez ça de l’arrogance, ça vous regarde. Mais je suis là pour accomplir une performance, pas pour agacer le réalisateur. » Parce que la sollicitation du moment l’absorbe entièrement et lui fait donner sans compter de sa personne, le natif ne se disperse guère. « Quand je travaille, a expliqué Christophe Lambert, je ne peux pas être amoureux en même temps : je ne peux pas donner cinquante pour cent à l’un, cinquante pour cent à l’autre, il faut que ce soit cent pour cent… »

En France, c’est un natif du Signe, Robert Badinter, qui a fait abolir la peine de mort. Toute notion d’éthique mise à part, l’idée comme la réalité de cette fin inéluctable qu’est la mort sont sans doute encore plus insoutenables pour celui qui est né sous le premier Signe de la première saison, puisqu’il porte en lui l’irrésistible élan vital inhérent à tout commencement. « On ne peut pas vivre si c’est pour mourir. Comment pouvez-vous supporter la pensée que vous êtes mortels ? » s’étonnait aussi douloureusement que naïvement le compositeur russe Serge Rachmaninov [5].

Mettant l’école de la vie au-dessus de toutes les autres, le Bélier est plus « brut » que sophistiqué, plus physique et instinctif que cérébral. Les cogitations trop intellectuelles l’ennuient. La pratique l’intéresse plus que la théorie. Agir lui va mieux que discourir. « Je n’ai pas pour habitude de questionner la vie, reconnaît Céline Dion. « Charles ne mord que du bout des dents à la philosophie », lit-on dans une biographie de Charles Baudelaire. « L’exposé des théories des grands maîtres de la pensée, depuis l’Antiquité jusqu’aux Temps modernes, lui paraît un verbiage fastidieux [6]. » « Je n’ai aucune envie de creuser trop profondément Freud et tout ce foutoir psychanalytique, juste pour dire “Can I have a cup of tea ?” », ironise Gary Oldman. « “Je pense, donc je suis” est un propos d’intellectuel qui sous-estime les maux de dents », doit-on à la plume aussi humoristique que « mordante » de Milan Kundera qui n’a pas caché son peu de goût pour les écoles, les groupes et les mouvements en tout genre. « La musique d’aujourd’hui est réfléchie, regrettait Serge Rachmaninov. Elle vient du cerveau et non plus du cœur. Ma musique tente d’exprimer simplement et sans détour ce que mon cœur ressent. » Exilé aux États-Unis, Rachmaninov aura été le premier à prédire que le renouvellement de la musique américaine passerait par la musique noire, qu’il qualifiait d’« authentique » [7].

Chez les artistes fortement marqués par le Signe, l’expression crache le plus souvent des émotions violentes — passion, rébellion, haine, désespoir. Sortie droit des tripes et du cœur, c’est au cœur et aux tripes qu’elle s’adresse. Pas de chichis, pas de fioritures. D’après Jean Marc Turine, « Marguerite Duras parle “cut” selon son expression, elle ne s’encombre d’aucune rhétorique, elle ne s’alourdit d’aucune langue de bois, elle ne recherche pas le parler intelligent ou sage… » « Écrire pour moi, a-t-elle expliqué, c’est arriver avec la crise au bout de la crise. »

La victoire du jour sur la nuit qui a lieu sous le Bélier incite non seulement à ne pas craindre, mais encore à vouloir mettre les choses en lumière. L’adapté se caractérise par son franc-parler, et les quelques politiciens du Signe sont connus pour ne pas pratiquer la langue de bois. « Dans notre société médiatique, on ne peut plus dire la vérité sous peine d’être durement sanctionné…, a déploré Claude Allègre. Un homme politique devrait avoir le même langage en public qu’en privé… » Daniel Cohn-Bendit a justifié son audience en Mai 68 par le fait qu’il était quelqu’un qui avait un « vrai parler vrai ».

Si la vérité sort de la bouche des enfants, c’est, dirait monsieur de La Palice, parce qu’ils ne sont pas encore civilisés. Il en va de même pour le natif d’un Signe, qui est celui de la naissance du jour, en rapport avec le moi individuel, ses pulsions et ses besoins de base, ainsi que celui de la mort de la nuit, en rapport avec le non-moi des valeurs collectives : règles, codes, institutions, socioculture… Les natifs du Signe ne se soucient guère de ce qu’il « convient » de savoir ou ne pas savoir, dire ou ne pas dire, faire ou ne pas faire. Ils prennent le formalisme pour de l’hypocrisie et rejettent radicalement ce qui leur donne l’impression de se couler dans le moule. « Je ne suis pas un animal sociable, ni social, se targuait Jean Giono. Je ne comprends pas la communauté ni la patrie. Je n’ai confiance qu’en l’individu. » « Cela a été une conséquence immédiate de la vie vécue et non pas de la lecture ou d’une expérience culturelle ou idéologique », a tenu à préciser Marguerite Duras à propos de son adhésion au communisme. « On peut faire passer des masses de choses avec l’habileté et je ne le veux pas, je ne le veux à aucun prix », s’insurgeait Jacques Brel [8]… « L’école n’ouvre pas l’esprit car elle inculque la peur… je refuse un monde efficace où l’on fait des enfants moutons », a déclaré Fanny Ardant — la bien nommée.

Parce qu’il est basique, le tempérament Bélier favorise un rapport au corps très « nature », qui peut faire défaut à ceux chez qui l’imprégnation culturelle est plus forte. « Elle m’a appris la liberté delà nudité », a révélé Yann Andréa, le dernier compagnon de Marguerite Duras, plus jeune qu’elle de plusieurs décennies pourtant. Josette Clotis (Bélier), qui a eu deux fils avec André Malraux (Scorpion), aimait « … le plein air, la nudité des corps entraînés à la beauté et à l’impudeur [9] », alors que le futur ministre de la Culture, très marqué par les Signes d’automne, préférait l’ombre de son bureau au plein soleil de la plage — où il se rendait tout habillé —, consacrant son temps à la lecture, à l’écriture ainsi qu’aux conversations intellectuelles et politiques, auxquelles sa compagne ne participait guère. Curieusement, celles qui ont succédé à Josette Clotis dans le cœur de Malraux, Madeleine Malraux, sa seconde femme, et Louise de Vilmorin, étaient également nées sous le premier Signe du printemps. C’est sans doute parce qu’ils ont beaucoup à apprendre l’un de l’autre que les extrêmes s’attirent.

Marguerite Duras pensait qu’il n’était pas nécessaire d’inventer, que ses obsessions et ses désirs étaient la matière première de ses livres. « Je suis complètement menée par ça », affirmait-elle [10]. La mort de la nuit, c’est aussi celle de la forme particulière de « non-moi » qu’est l’absolu hivernal. Le monolithisme figé des hivernaux pour qui rien n’existe en dehors du dieu immuable qu’ils se sont trouvé, est aux antipodes du mode de fonctionnement épidermique auquel prédispose le début du printemps. Si le désir, par essence changeant, est le moteur de la plupart des êtres humains, c’est encore plus vrai pour l’effervescent natif du Bélier qui assimile le désir à la vie et va sans complexe au bout du sien. Jamais arrêté par la peur d’être lui-même, il est sa première et dernière référence. Autant dire que son authenticité constitue son meilleur atout. Billie Holiday pensait que « … copier musicalement quelqu’un, revenait à travailler sans sentiments profonds réels. Il n’y a pas deux personnes sur terre qui se ressemblent, et si l’on n’est pas soi-même en musique, ce n’est pas de la musique. »

Les commentaires d’une journaliste à propos d’Alexandre Jardin, écrivain très représentatif des qualités d’enthousiasme, d’audace, d’implication maximale dans l’instant, auxquelles porte l’excitabilité innée et polarisée du Signe, résument le programme Bélier : « Il s’agit de tordre le coup à nos peurs, aux retenues qui nous ligotent, d’oser être dans notre vérité intime, d’oser exprimer le murmure intérieur de nos sentiments. Par ailleurs, il s’agit surtout d’injecter de l’invention dans notre vie, non pas de mener notre vie, encore moins de la subir, mais bel et bien de la créer, d’y inscrire le sceau de notre imagination personnelle. Il s’agit encore, dans une décision radicale, de refuser de céder à la résignation, à toute médiocrisation de nos aspirations et de nos idéaux. Alexandre Jardin veut ôter le lecteur de la tiédeur de toute félicité tranquille, le sortir d’un quotidien de somnambule [11]. » « La vie est trop courte pour être petite », résume lui-même l’écrivain.

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Deuxième facette : vitesse d’excitation

Croissance du processus dominant : vitesse. Jour : excitation. Croissance du jour dominant : vitesse d’excitation. Rapidité des réponses.

L’astrologie moderne a établi que naître sous un Signe dont le pôle dominant — jour ou nuit — augmente, favorise la vitesse réactive. La nuit dominante et croissante de l’automne se traduira par la « vitesse d’inhibition adaptée » qui permet de se rétracter vite et bien. Le jour dominant et croissant du printemps va de pair avec la « vitesse d’excitation adaptée » qui fait répondre vite et bien — de façon immédiate et appropriée — aux diverses sollicitations de l’environnement.

Le natif est du premier mouvement : il comprend et démarre au quart de tour, réplique du tac au tac, ne diffère pas la satisfaction de ses besoins, joint le geste à la parole et se mobilise instantanément quand les circonstances l’exigent, à la façon de Jean-Paul Belmondo.

« J’avais déjà tourné La Ciociara et La Novice, a-t-il raconté, et j’avais promis à ma femme de rentrer en France pour qu’on parte enfin en voyage de noces. Bolognini vient me trouver pour La Viaccia. Je refuse, il insiste… Je rentre à Paris et mon agent me dit : “Le producteur et le réalisateur sont là, passez cinq minutes.” J’arrive : il y a une petite mallette sur la table. Ils l’ouvrent avec un air généreux : “Alorrrrs ?” Là, j’ai dit : “À quelle heure est l’avion [12] ?” »

La vitalité Bélier se manifeste autant par la facilité à s’émouvoir que par la rapidité à se mouvoir. « Un homme immobile est prisonnier… C’est un parti pris, je ne veux pas attendre », décrétait Jacques Brel [13]. Rachmaninov a été décrit par ceux qui l’ont côtoyé comme un fou de vitesse. Herbert von Karajan pensait et agissait très rapidement. À l’âge de quatre-vingts ans, il commanda une Porsche qui faisait 312 km/h et montait à 100 km/h en trois secondes : « C’est la seule manière de ne pas ramollir son cerveau », avait-il commenté. « Je suis jeune parce que j’ai toujours ce désir de bouger qui me consume », rapportait le mime Marceau [14] à soixante-dix ans. On ne s’ennuie pas avec l’adapté du Signe, on ne se repose pas non plus. Passant sans transition et avec autant de fougue d’une envie, d’une nécessité à une autre, c’est un spécialiste des coups de foudre et des actions éclairs dans tous les domaines. « Le mariage, il faut le faire tout de suite ou pas du tout », professe Josiane Balasko. « Je fonce direct… toujours dans le stress… pas de préméditation… c’est jeté d’instinct… », a lancé Serge Gainsbourg.

Doué pour initier une opération, la lancer, en accélérer le cours, la « booster », en modifier l’orientation dès que le résultat escompté se fait attendre, le natif n’aime pas traîner. Ce n’est certes pas lui qui endormira son entourage par sa passivité, sa lenteur ou son indécision. Marion Brando a failli devenir fou lors d’une représentation officielle d’un opéra thaï traditionnel. « Un simple roulement d’yeux semblait prendre des années ; un pas ou un geste de la main, des siècles. J’eus bientôt du mal à rester éveillé », a-t-il rapporté [15]. Christopher Walken [16] prétend avec humour que la réplique de théâtre qu’il préfère entre toutes, est celle qui ouvre l’Hamlet de Shakespeare : « Who is there ? », parce qu’elle est « … brève, simple, provocante et mystérieuse à la fois [17] ». « Il faut écrire un dialogue aussi vite qu’il se dit », recommande le cinéaste Éric Rohmer.

« Je ne me concentre jamais sauf quand il faut pleurer. Là, j’ai besoin de cinq minutes », assure l’actrice Judith Godrèche qui précise : « Si j’évite la concentration, c’est parce que je veux avoir l’impression que, quand ça tourne, il n’y a pas de gâchis, que c’est vraiment à l’instant même que ça arrive, pas avant. » « Si je me concentre, je m’endors ! » a déclaré Jean-Paul Belmondo, qui ne s’est apparemment pas souvent pris la tête pendant des heures pour entrer dans la peau d’un personnage.

À quoi sert de faire des prévisions, puisque les choses ne se passent jamais comme on l’avait craint ou espéré ? L’adapté du Signe est un imaginatif du présent qui s’ennuie dans la routine et ne se répète guère. Si Marion Brando a autant été apprécié par ses metteurs en scène, c’était assurément pour l’intensité et la vérité exceptionnelles de son jeu, mais sans doute aussi parce qu’il se renouvelait sans cesse. « Je ne peux pas supporter de chanter deux soirées de suite la même chanson de la même façon », a confié Billie Holiday. « Pour un acteur, c’est l’imagination qui doit jouer, pas l’imitation, pense Jean-Paul Belmondo. Je ne comprends pas cette maladie qui nous est venue d’Amérique, où on doit passer dix jours dans un commissariat pour jouer un simple flic [18]. »

La franchise Bélier est moins un principe que le plus court chemin entre la pensée et son expression, entre l’expression et sa concrétisation. En adéquation aussi simultanée qu’intensive avec ce qui le sollicite dans l’instant, le natif ne perd pas de temps à revenir en arrière, ni à ressasser le passé. « Peu importe ce qui est à l’origine d’une épreuve. Karajan ne cherche pas à en comprendre la raison, il se contente d’expliquer comment faire pour la surmonter en se fixant un programme…, révèle l’un de ses biographes… Disséquer et commenter une réalisation à moitié réussie, chercher qui n’a pas fait ce qu’on attendait de lui et pourquoi, ne présente aucun intérêt pour lui, il en est déjà à sa prochaine réalisation et ne pense plus qu’à celle-ci [19]. » « Je crois que ce n’est pas très intelligent de regretter les routes qu’on n’a pas prises… », pense Warren Beatty. De son propre aveu, Claudia Cardinale aime brûler sa vie, ne baisse jamais les bras, n’a ni regrets, ni remords, vit au jour le jour sans retours en arrière. Louise de Vilmorin adhérait pareillement à l’idée qu’il ne faut jamais se retourner sur le passé pour ne pas verser les quelques larmes qui vous transformeraient en statue de sel, sans plus de présent ni de futur.

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Troisième facette : sens des contraires

L’écart entre le jour dominant qui croît et la nuit dominée qui décroît est minimal mais se creuse : sens des contraires et séparation des contraires…

C’est sur l’écart entre la durée du jour dominant et croissant et celle de la nuit dominée et décroissante que repose la différence de fond entre les trois Signes du printemps, puisque de minimal au Bélier, il deviendra moyen au Taureau, puis maximal aux Gémeaux. Le fait qu’il y ait presque autant de jour que de nuit ou de nuit que de jour, caractérise les quatre Signes — Bélier, Vierge, Balance, Poissons — qui se situent autour de l’axe des équinoxes. Il en découle une sensibilisation commune aux contraires qui prendra des formes différentes selon que c’est le jour ou la nuit qui domine, selon qu’ils sont croissants ou non.

Au stade Bélier, l’écart entre le jour et la nuit se creuse, les éloignant progressivement l’un de l’autre, si bien que l’astrologie moderne parle pour ce Signe de « séparation des contraires ». L’adapté du Signe perçoit de façon aiguë les antagonismes de base (jour/nuit, présence/absence, chaud/froid, vie/mort, mouvement/immobilisme, vérité/mensonge, amour/haine, bien/mal, ami/ennemi…), et s’attache à leur incompatibilité. Celle-ci est moins évidente qu’il n’y paraît, puisque les trois autres signes d’équinoxe favoriseront une autre perception des opposés. La Balance, par exemple, sensibilisera à leur complémentarité.

Le natif trace une frontière claire et nette entre les contraires. Le blanc n’est pas le noir, le bien n’est pas le mal. Lui-même se situe dans un camp contre et à l’exclusion d’un autre : s’il est de gauche, il n’est pas de droite et combat celle-ci. L’ensemble du profil incite à appeler un chat un chat et annoncer la couleur sans ambiguïté. « La nécessité d’un oui ou d’un non est absolue », assure Émile Zola. « Si j’aime une femme, je ne vais pas la tromper… Si une femme m’aime, elle ne peut pas me tromper pour la simple raison qu’elle m’aime… », croit Éric Rohmer avec une enviable simplicité. Ces propos évoquent ceux qui ont marqué la rencontre de Josette Clotis et André Malraux. « En novembre 1932, à un cocktail, elle entend dire de quelqu’un qu’il est très amoureux. Elle laisse échapper : “Mais… il est marié.” Malraux qui se trouve près d’elle, dit avec un air de grande surprise : “Quel rapport ?” Puis, très gentiment : “Oui, il est marié, et il est aussi amoureux de cette femme [20].” »

Toutes ses facettes allant dans le même sens, l’adapté du Bélier ne tourne pas autour du pot et attire l’attention sur ce qui compte. Il n’a pas de problèmes de choix ni d’engagement, n’esquive ni ne louvoie, répugne aux solutions hybrides, aux concessions opportunistes, à tout ce qui l’amènerait à renier et même à moduler son credo du jour. « Miss Davis prononce certaines phrases de façon percussive, comme une caisse claire humaine. Elle a un sens très développé de ce qui est juste ou faux, bien ou mal… », a rapporté un journaliste à propos de Bette Davis. Raymond Barre aura toujours été un adversaire déclaré de la cohabitation. « Bien sûr, une vie sans compromis n’existe qu’en rêve, a reconnu le réaliste Andy Garcia, mais il est bon de garder constamment ce rêve en éveil [21]. »

Loin de craindre la bagarre, la plupart des Béliers donnent leur pleine mesure dans la confrontation directe et n’hésitent pas à provoquer des conflits ouverts quand la nécessité s’en fait sentir, en particulier quand le manque de clarté ou de décision de quelqu’un les empêche de savoir à quoi s’en tenir. Certains vont jusqu’à voir dans le désaccord, la controverse, le duo-duel, un piment plus intéressant que le calme plat. « Un critique d’une revue musicale m’a descendu en flammes, a raconté Elton John à ses débuts, et cela m’a amusé, ou plutôt cela m’a donné envie de rencontrer ce critique, tellement j’en ai assez de tous ces gens qui me traitent comme un chien savant. » Plus le natif du Bélier s’oppose, plus il s’affirme, plus il existe. Si on le cherche, on le trouve. Peut-être même fait-il en sorte qu’on le cherche pour se trouver lui-même. Gare à qui conteste sa vérité ou ne joue pas franc jeu avec lui, il sera mis en pièces, d’une façon ou d’une autre. Bette Davis, par exemple, n’a pas hésité à attaquer en justice la compagnie Warner Bros qui l’avait sous contrat, sous prétexte que les dirigeants cherchaient à lui faire jouer des rôles qui n’étaient pas adaptés à sa personnalité. « Plus tu refuses, plus t’es opposé, plus tu vis », proclamait Marguerite Duras.

Né le 10 avril 1944, Fritz Zorn [22] raconte dans Mars, son livre posthume paru en 1976, comment s’est développé le cancer qui allait prématurément l’emporter. Ses parents refoulaient tout avis personnel négatif, tout désir, toute agressivité pour entretenir une atmosphère de fausse harmonie. « On objectera, a écrit ce Bélier mort d’avoir été castré dès le début de sa vie, que l’harmonie totale est du domaine de l’impossible, qu’il ne peut y avoir de lumière que là où il y a aussi de l’ombre, et que ça ne doit pas aller trop bien pour la lumière si elle ne sait pas que l’ombre existe. Et je suis d’accord avec cette objection. »

Le sens Bélier des contraires donne le goût des contrastes accusés et des couleurs vives. Avec la force et la vitesse d’excitation, il est la meilleure arme aussi bien pour imposer et défendre ce que l’on juge bon, que pour attaquer et réduire à néant ce que l’on juge mauvais [23].

« Faire du théâtre, c’est avoir des partis pris très forts », affirme la soprano française Natalie Dessay. « La haine est sainte. Dire du bien de ceux qu’on aime, ce n’est point assez, il faut dire du mal de ceux qu’on hait », assurait Émile Zola, illustrant ainsi l’aptitude à aimer comme à détester sans réserve, à adhérer comme à rejeter en bloc, que donne le sens printanier des contraires. En cas de litige, l’adapté est servi par son art de la riposte cinglante et rend coup pour coup, en y prenant le plaisir de celui qui sait tirer à bout portant. La balle, celle de la victoire du jour qui se confirme au fil du temps, est dans son camp. Quels que soient son degré d’évolution, le reste de son ciel et ses autres conditionnements, il y a chez tout natif du Signe l’aspiration à se battre pour ou contre quelque chose, en restant fidèle à lui-même et à ses motivations — toujours impérieuses —, ses convictions — toujours tranchées —, ses passions — toujours exclusives — du moment. Plus vrai que nature et d’un seul bloc, le natif est comme il est : à prendre ou à laisser.

Bélier

Bélier : profil inadapté

Bélier

Première facette : faiblesse d’inhibition extinctive

Nuit décroissante et dominante des Poissons : déconnexion, recul adaptés… Nuit décroissante mais dominée du Bélier : manque de déconnexion, de recul, de contrôle, de freins…

De même que, pour un Signe donné, l’astrologie moderne fait relever les tendances qui favorisent l’adaptation, de son pôle dominant — jour ou nuit — et de la façon dont il domine, de même fait-elle relever les carences susceptibles de gêner l’adaptation, de son pôle dominé et de la façon dont il l’est. L’individu marqué par un Signe n’en actualise pas forcément toutes les facettes. En général, celles du profil inadapté alternent ou se mélangent avec celles du profil adapté, l’ensemble prenant des formes diverses selon le reste du ciel, selon la force ou la faiblesse de la personnalité, selon aussi les situations rencontrées. On ne répétera jamais assez qu’un Signe du zodiaque n’est qu’un élément, important certes mais pas suffisant, du ciel natal, lequel n’est qu’un conditionnement en interaction avec tous les autres conditionnements non célestes auxquels l’être humain est assujetti.

Le profil inadapté d’un Signe est, grosso modo, une caricature de l’adapté. Il est aussi une sorte de négatif du Signe « inverse » dont les atouts correspondent aux carences qui le caractérisent, et vice versa. Parce que la nuit Poissons domine quand bien même elle décroît, alors que la nuit Bélier décroît en étant dominée ; parce que l’écart minimal entre les pôles diurne et nocturne de ces deux Signes se réduit pour le premier et s’agrandit pour le second, ils sont l’inverse l’un de l’autre. Si l’adapté du dernier mois de la dernière saison est sensibilisé à la fin des choses au point de rester indifférent aux superficialités à court terme du monde extérieur, pour mieux se consacrer à ce qui l’intéresse vraiment, l’inadapté du premier mois de la première saison fait feu de tout bois. À l’instar de Marion Brando, il est « … une bombe qui ne demande qu’à exploser [24] ». C’est un écorché vif que trop de choses atteignent et qui, à la façon du nouveau-né, réagit aussi violemment à une contrariété mineure qu’à une frustration majeure. Recevant le monde de plein fouet, il le renvoie de même. Il ne sait pas prendre sur lui.

« C’est pas la peine de savoir où l’on va, faut y aller », disait Marguerite Duras, sur le ton péremptoire typique de son Signe. Les raisons de réagir ou de bouger importent peu à certains natifs, du moment qu’ils s’extériorisent et s’agitent assez pour déverser leur trop-plein d’énergie et de révolte. Seuls les morts sont immobiles, sourds et muets et l’inadapté ne peut ni ne veut faire le mort quand les circonstances, ne serait-ce que la simple civilité, l’exigent. Ne s’inquiétant ni de l’opportunité de ses réactions, ni des dégâts que celles-ci sont susceptibles de provoquer, il manque de recul et se jette la tête la première dans ce qui correspond à son besoin d’éclatement du moment. Contrairement au natif des Poissons, il est incapable de rester en retrait et de laisser une situation complexe se décanter toute seule.

Il suffit qu’il se soit levé du mauvais pied, ou que la tête de quelqu’un ne lui revienne pas, pour que le natif scie activement la branche sur laquelle il s’était donné le mal de s’asseoir. « À sa façon inimitable, il est à deux doigts de saborder le film qui doit devenir le sommet de sa carrière », trouve-t-on dans une biographie de Marion Brando [25]. Sur le plan professionnel, cette facette prédispose à ne pas assurer le minimum de suivi aux décisions et aux réalisations. « Je ne pense pas que j’aurais pu me faire à un horaire régulier, rapporte lui-même Brando dans ses Mémoires… je me débrouille mal là où on attend de moi discipline et responsabilités… Le souvenir le plus marquant que je garde d’Un tramway nommé désir, c’est le calvaire que constituaient pour moi ces huit représentations hebdomadaires [26]. »

Dans leurs relations avec autrui et sous prétexte de fidélité à soi-même, d’horreur de la dissimulation et des complications, certains natifs suivent leurs seules humeurs, tiennent compte de leurs seules envies, et épuisent tout le monde par leurs caprices, leurs débordements et leur impatience chroniques. « Quand je dis on ferme : on ferme. C’est moi le boss… Je ne suis pas altruiste, je n’en ai rien à cirer des autres… », ne s’est pas privé de dire Serge Gainsbourg. « Avec les journalistes, qui tremblent en attendant leur tour, Russell Crowe peut se montrer retors, cynique, interrompant net l’entretien parce qu’une question ne lui plaît pas », lit-on dans un portrait consacré à l’acteur néo-zélandais. « Personne ne m’avait jamais hurlé dessus de la sorte ! » s’est indigné quelqu’un. « Les réalisateurs sont catégoriques, l’homme est cassant : “Le problème de Russell, c’est qu’il a énormément de bonnes idées mais aucun tact” », a déclaré l’un d’eux [27].

Faiblesse de la nuit oblige, mettre les formes, se montrer un tant soit peu diplomate, est en effet le cadet des soucis de nombreux natifs. La façon dont Jean-Paul Belmondo, pressenti pour le rôle principal de Moderato cantabile, a raconté son entrevue avec Marguerite Duras et Peter Brook, respectivement scénariste et réalisateur du film — ils sont nés tous les trois sous le Signe du Bélier —, vaut son pesant d’or. « Duras me regardait : “Ha, il est pas du tout le personnage !” Et Brook ajoutait : “Ah non, je crois pas du tout !” Finalement, j’ai été engagé, a précisé Bébel. Je dois dire que ce n’est pas un souvenir extraordinaire. Je n’ai jamais compris le texte que je disais. Même maintenant [28]. »

N’arrivant pas à s’abstraire de son ressenti immédiat, ni à se mettre à la place de quiconque, l’inadapté est un grand gaffeur. On pourrait espérer qu’à force de bévues, il parvienne progressivement à voir plus loin que le bout de son nez, mais même quand il prend conscience de l’ampleur des dégâts provoqués par ses incongruités, les regrettant avec une sincérité telle qu’on lui pardonne sans autre forme de procès, il récidive à la première occasion. Il ne retient pas les leçons du passé.

Le comportement souffre d’une incapacité globale à tenir compte des impératifs sociaux. « Quand j’entends dire que j’ai été bien dirigé par certains metteurs en scène, s’est rebiffé Michel Simon, le rouge me monte au front car je n’ai jamais été dirigé, même quand j’étais soldat de deuxième classe… » « Je haïssais l’autorité et j’ai tout tenté pour la bafouer, tout plutôt qu’être traité comme un numéro… », s’est vanté Marion Brando, qui a également confessé que toute sa vie, il n’avait « cessé de mettre en cause la moindre obligation [29]… »

« Je décide de mes attirances », prétendait assez puérilement Serge Gainsbourg [30]. En réalité, ce sont ses attirances qui décident pour l’inadapté. L’absence de retenue le porte aux emballements inconsidérés qu’il cherche à concrétiser sans attendre. Sur le plan amoureux, les conséquences en sont tragi-comiques. « L’amour, j’y crois chaque fois, a confié Christophe Lambert. Au début, je me dis : je l’aime, je suis amoureux, et puis je me réveille trois jours plus tard en me disant que je l’aime beaucoup, mais que je ne l’aime pas. Et c’est là que les pires emmerdements commencent si jamais ça marche de l’autre côté, car comment expliquer tout à coup ? C’est terrible, ça a l’air d’un jeu alors que ça ne l’est pas [31]… » « Ce qui me touche, expliquait Louise de Vilmorin sur le même ton, c’est l’attirance à première vue, mais les gens perdent si vite leur charme, je suis trop vite désenchantée… Une chose est vraie le matin, crac ! elle n’est plus vraie le soir. Je t’aime à la folie ! Le soir on me dit : “Mais tu me l’as dit ce matin, alors tu ne m’aimes plus ?” Bah non. “Alors tu m’as menti ?” Mais non, je ne t’ai pas menti, je t’aimais ce matin et ce soir je ne t’aime plus. Je suis comme ça. Que faire ? C’est embêtant [32]. » « … Tu m’auras gaspillé à te vouloir bâtir un bonheur éternel, ennuyeux à périr… », chantait Jacques Brel.

« Je ne fais pas d’arrêt image. Sinon je me flingue », se justifiait Serge Gainsbourg. L’inadapté n’obtient et ne maintient l’état d’exaltation sans lequel tout lui paraît insipide, qu’en grillant les feux rouges sur un plan ou un autre. C’est le dépassement de la vitesse autorisée et le franchissement de la bande jaune qui a coûté sa jeune vie à Françoise Dorléac dont la sœur cadette, Catherine Deneuve, pensait qu’elle « brûlait les étapes ». Il n’est pas impensable non plus que le terrible accident de voiture où a péri la princesse Diana ait été dû à des injonctions pressantes de Dodi Al Fayed (Bélier) au chauffeur de rouler plus vite. Alain Prost (Poissons) est encore en vie, mais pas Ayrton Senna (Bélier). Dans Le Hussard sur le toit, le plus célèbre roman de Jean Giono — né un 30 mars — que Jean-Paul Rappeneau — né un 8 avril — a adapté au cinéma, la mère du hussard craint que son fils ne soit pas assez fou. « Les hommes prudents sont des infirmes. Je hais la prudence. Il faut être fou, imprudent… », préconisait Jacques Brel, mort prématurément d’avoir brûlé sa vie.

Bélier

Deuxième facette : lenteur d’inhibition inadaptée

Décroissance de la nuit dominante des Poissons : lenteur d’inhibition adaptée, refus inébranlables mais adéquats. Décroissance de la nuit dominée au Bélier : lenteur d’inhibition inadaptée, refus inébranlables inadéquats.

La décroissance de la nuit dominante se manifeste chez l’adapté des Poissons par un « non » ferme et irrévocable à ce qui le distrait de l’essentiel. La décroissance de la nuit dominée se traduit chez l’inadapté du Bélier par l’impossibilité à revenir sur une position, particulièrement quand elle défie le bon sens. La facette précédente se résumait à une absence de freins, celle-ci à un frein bloqué. Quels que soient le contexte et ses variations, le natif est doublement ingérable, puisque ses éclats imprévisibles n’ont d’égal que ses entêtements rigides et sa mauvaise foi. « J’ai suffisamment d’orgueil pour essayer de ne pas revenir sur une décision… », avertissait Jacques Brel, illustrant ainsi l’incapacité Bélier à se montrer souple et ouvert, quand bien même l’intérêt tant général que particulier l’exigerait. Jacques Brel livre d’ailleurs là le paradoxe d’un Signe qui, dans ses aspects négatifs, porte autant à s’enfermer soi-même dans des a priori ou a posteriori irrévocables, qu’à s’insurger contre la prison de l’immobilisme.

D’autant plus intransigeant et inflexible qu’il ne voit pas au-delà de ses affects personnels et a des convictions tranchées, l’inadapté rompt mais ne plie pas. « Il y a des gens qui veulent que je me couche, eh bien ! je ne me coucherai pas », déclarait Claude Allègre, ministre de l’Éducation nationale du gouvernement Jospin. L’imperméabilité aux exhortations raisonnables qui demandent de mettre de l’eau dans son vin, de moduler un avis trop arrêté, une décision trop abrupte, une position trop radicale, de mâcher un peu plus ses mots, ménager davantage les autres en effectuant le début de marche arrière qui permettrait de débloquer une situation, a été résumée par Jacques A. Bertrand, un humoriste féru d’astrologie : « L’âne est un entêté de l’arrière-train, explique-t-il. Il porte tout son poids sur ses pattes postérieures et refuse d’avancer ; le Bélier porte tout son poids sur les pattes frontales et refuse de reculer : on voit bien la différence [33]. »

Bélier

Troisième facette : phase égalitaire

La durée de la nuit dominée et décroissante équivaut presque à celle du jour dominant et croissant. Phase égalitaire : réactions identiques d’agressivité et d’exclusion devant des situations ou des choix opposés…

Le creusement de l’écart entre la durée du jour dominant et celle de la nuit dominée, qui marque le début de l’année zodiacale, donne à l’adapté du Signe le sens des contraires et l’incite à adopter devant des situations opposées, des attitudes qui le sont aussi. À l’inverse, le peu d’écart entre la durée du pôle dominant et celle du pôle dominé, autrement dit leur quasi-équivalence, se manifeste chez l’inadapté par des réactions identiques face à des incitations contraires. C’est ce que l’astrologie moderne désigne par « phase égalitaire ».

Sur fond de réactivité forte et rapide, l’adapté adhère à fond à ce qui lui convient et rejette en bloc ce qui le rebute. S’il a pris fait et cause pour le blanc, il combattra le noir. Sur fond d’absence de recul et d’entêtement, l’inadapté qui a perdu le sens des polarités est systématiquement rejetant, quelles que soient l’attitude — amicale ou hostile — de l’interlocuteur, la qualité — attractive ou non — de la sollicitation. « Plus il avance dans la vie, plus il aime choquer, intriguer, et, à l’extrême, déplaire… L’agressivité de Baudelaire n’épargne personne », a écrit Henri Troyat à propos du poète qui avait pris pour devise « … se détruire pour mieux exister [34]… » « À l’adolescence, a révélé Fanny Ardant, quand on me demandait ce que je voulais être plus tard, je ne savais dire que : “Je serai contre.” » Quand Gainsbourg devenait Gainsbarre, autrement dit quand ses démons prenaient le dessus, il se montrait odieux vis-à-vis de tout le monde, y compris de ses amis les mieux intentionnés. Il aimait d’ailleurs faire remarquer qu’à la différence d’un ciel d’orage, un ciel bleu ne présente pas le moindre intérêt et que le photographier n’imprimerait que du néant. Il semblerait que certains natifs assimilent l’harmonie au vide et ne puissent s’empêcher de la détruire, comme s’ils voulaient se venger d’un monde jamais assez pur, ni assez vrai pour eux.

L’adapté ne craint pas les conflits ouverts quand ils s’avèrent nécessaires, l’inadapté rue dans les brancards, jette de l’huile sur le feu, sème la discorde, à tout moment et où qu’il soit. Né au lever de la Lune — qui porte à privilégier le calme et l’harmonie — dans le Signe autoprotecteur de la Vierge, Paul Gauguin a très vite eu du mal à accepter « la présence envahissante » de Vincent Van Gogh qui le vénérait pourtant. « Le combat qu’ils avaient espéré mener ensemble a très vite tourné à l’affrontement et au corps à corps. » « Vincent et moi ne pouvons vivre côte à côte. Trop d’incompatibilité d’humeur », avait écrit Gauguin au frère de Van Gogh, après une soirée au cours de laquelle ce dernier lui avait, sans raison, jeté à la tête son verre rempli d’absinthe [35].

La phase égalitaire Bélier prédispose à ce que tout devienne prétexte non seulement à provocation et bagarre, mais aussi à témérité. L’inadapté ne met aucune sourdine quand il encourt un réel danger. Serge Gainsbourg a fumé de plus belle après que ses médecins l’eurent prévenu qu’il était menacé d’artérite avec amputation des jambes à la clé. Les morts aussi précoces que spectaculaires de Françoise Dorléac ou Dodi Al Fayed constituent une autre illustration possible d’un comportement unilatéralement imprudent, sur lequel aucune sonnette d’alarme n’a d’effet.

L’ensemble du profil débouche sur des attitudes manichéennes et sans nuances où l’implacabilité le dispute à l’intolérance. Le « tout ou rien », le « maintenant ou jamais », le « quitte ou double », qui résultent du manque et de l’excès de frein sur fond d’opposition systématique, font basculer brutalement d’un extrême à l’autre et brûler aujourd’hui ce qu’on adorait la veille. « Ses sautes d’humeur, ses changements de cap, ses volte-face étaient imprévisibles », lit-on aussi dans la biographie de Baudelaire. « Tantôt il accable sa mère de sarcasmes et de reproches, tantôt il lui crie son amour avec des accents enfantins ; tantôt il la supplie de venir le voir au plus vite, tantôt il lui demande sèchement de ne pas le troubler dans sa solitude. »

L’inadaptation Bélier se manifeste par l’outrance dans tous les domaines et il n’est guère étonnant que les statistiques de Suzel Fuzeau-Braesch [36], la seule scientifique, à ce jour, qui se soit penchée « scientifiquement » sur l’astrologie, montrent que, de tous les Signes du zodiaque, ce serait le Bélier qui compterait le plus grand nombre d’asociaux dans ses rangs. Mais l’excès d’égoïsme n’a souvent d’égal que la débauche de générosité et certains natifs vous volent sans pitié dans les plumes pour vous donner leur chemise l’instant d’après, avec la même désarmante et enfantine spontanéité.

Cet article vous a été proposé par Françoise Hardy

[1] Dr Borsarello, L’Acupuncture et l’Occident, Fayard.

[2] Toutes les personnalités citées au long de l’ouvrage sont nées sous le Signe traité. Russell Crowe est un acteur néo-zélandais rendu célèbre par ses prestations exceptionnelles dans des films américains, en particulier L.A. Confidential de Curtis Hanson, The Gladiators de Ridley Scott et surtout The Insider de Michael Mann, avec Al Pacino.

[3] Peter Manso, Brando, la biographie non autorisée, Presses de la Cité.

[4] Interview de Didier Perrin, Libération, février 2002.

[5] Victor Séroff, Rachmaninov, Robert Laffont.

[6] Henri Troyat, Charles Baudelaire, Flammarion

[7] Voir note 6.

[8] Dominique Arban, Cent pages avec Jacques Brel, Seghers.

[9] Suzanne Chantal, Le Cœur battant, Grasset.

[10] Cité par Jean Marc Turine, dans « Le ravissement de la parole », INA/Radio

[11] Article de Sylvane Larcher.

[12] Interview réalisée par les frères Kruger pour la revue Première, avril 1995.

[13] Voir note 8.

[14] Les deux mimes les plus célèbres du monde occidental, Charlie Chaplin et Marcel Marceau, sont du Bélier. Peut-être parce que, pour ce Signe « nature », le langage du corps est plus direct et triche moins que celui des mots.

[15] Marion Brando, Les Chansons que m’apprenait ma mère, Belfond.

[16] Christopher Walken : acteur américain devenu célèbre grâce à sa stupéfiante prestation dans Voyage au bout de l’enfer, de Michael Cimino. Il est l’un des acteurs fétiches d’Abel Ferrara.

[17] Interview de James Lipton pour « Actors Studio ».

[18] Voir note 11.

[19] Histoire de ma vie, avec la collaboration de Franz Endler, Éditions Carrère/Vertiges du Nord.

[20] Suzanne Chantal, Le Cœur battant, Grasset. Le Scorpion, Signe solaire de Malraux, porte à être plus subtil et plus compliqué aussi que le Bélier.

[21] L’acteur américain Andy Garcia est né avec la Lune en Taureau, Signe qui porte à mieux composer avec ce qui est face à soi que le Bélier.

[22] En allemand, « Zorn » signifie « colère ». Mars symbolise les pulsions d’agression. Le véritable nom de l’auteur est « Angst » qui veut dire « peur ».

[23] À condition que la planète Mars ne soit pas trop faible dans le ciel natal ou que des Signes plus conciliants ne soient pas plus dominants.

[24] Marlon Brando, Les Chansons que m’apprenait ma mère, avec Robert Lindsey, Belfond.

[25] Peter Manso, la Biographie non autorisée, Presses de la Cité.

[26] Voir note 27, Brando.

[27] Didier Péron, Libération, février 2002.

[28] Interview Première.

[29] Voir note 23.

[30] Interview par l’auteur, Entre les lignes, entre les Signes, Éditions RMC, 1987.

[31] Interview par l’auteur.

[32] « Du côté de Verrières », interview radiophonique d’André Parinaud, 1957.

[33] Jacques A. Bertrand, Tristesse de la Balance et autres Signes, Julliard.

[34] Henri Troyat, Baudelaire, Flammarion. Bien que le Bélier favorise plus qu’un autre Signe l’attrait pour le danger et que cette dernière facette prédispose à traiter aussi mal l’ami que l’ennemi, aucun Signe ne favorise la propension à la destruction et à l’autodestruction qui ne relèvent pas du conditionnement céleste.

[35] Article de Jean François Chaigneau, Paris-Match.

[36] Suzel Fuzeau-Braesch, docteur ès sciences, directrice de recherches au CNRS, directrice du Laboratoire de biologie de l’insecte. Auteur de L’Astrologie, coll. « Que sais-je ? », Presses Universitaires de France.

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